POUR LIRE NOS AUTRES CARNETS DE VOYAGE : CLIQUEZ ICI

POUR NOS CROISIÈRES EN CATAMARAN, cliquez sur le lien suivant : WWW.VOILEPASSIONSOLEIL.COM

POUR NOUS REJOINDRE : LUCIE DE SERRES & RÉAL SAVARD Courriel : REALSAVARD@HOTMAIL.COM

Marrakech

15 au 20 janvier 2013

Le Maroc est la destination privilégiée des camping-caristes français pour l'hiver, c'est leur «Floride» en quelle que sorte. Plein de soleil dans le sud, de la chaleur, des bas prix, quoi demander de mieux? Essentiellement, il y a deux sortes de voyageurs en camping-car au Maroc : ceux qui se rendent directement à Agadir et qui s'installent dans un camping 5* en bord de mer pour y passer, 2 ou 3 mois, voire plus et c'est la majorité des gens, et ceux qui voyagent à travers le Maroc pour explorer et découvrir le pays. Nous choisissons donc d'être de la seconde catégorie et de profiter pleinement du visa de 3 mois qui nous est accordé, d'autant plus que c'est une premier séjour en Afrique pour nous deux, excluant quelques semaines passées en voilier avec le Sol Maria dans les îles du Cap-Vert au large du Sénégal en 2008.

Depuis Séville, c'est direction plein sud sur Algeciras d'où partent les traversiers qui nous feront franchir le détroit de Gibraltar. Ce sera notre 3e passage du détroit, le premier en 2004 lorsque nous avions convoyé le voilier Grand Jubilee puis en 2007-2008 un aller-retour en Méditerranée avec notre catamaran, le Sol Maria. Souvenirs, souvenirs...

Gibraltar vu d'Algeciras
À notre arrivée à Algeciras, nous sommes estomaqués ! Ce sont plus de 200 camping-cars qui sont garés partout en attente de traverser !!! On se dit qu'il y a dû avoir un problème avec les bateaux et que tout ce beau monde est en attente. Eh bien non ! Renseignement pris, on nous dit qu'on peut embarquer demain matin si on veut, qu'il y a un bateau à toutes les heures et que c'est le trafic normal ! Ça illustre bien la popularité de la destination ! Nous faisons donc nos dernières provisions car certaines denrées sont rares au Maroc ou à des prix prohibitifs notamment les fromages, vins, viandes de porc et de bœuf puis nous achetons notre billet pour le lendemain.

La traversée du détroit de Gibraltar s'effectue sans problème. En moins d'une heure nous débarquons au grand port de Tanger, le Tanger-Med à une vingtaine de km à l'est de Tanger. Il y aura bien deux heures d'attente pour faire les formalités d'immigration et passer la frontière mais bon... puisqu'un proverbe marocain dit «qu'un homme pressé est un homme mort», nous prenons notre mal en patience, il y a plein de quoi à s'occuper à bord...

Arbres en fleurs en route pour Marrakech
Le temps est gris et encore frais, nous décidons donc de descendre vers le sud sans plus attendre pour aller chercher du soleil et de la chaleur. Il y a certes de jolies villes sur la côte (Rabat, la capitale, Casablanca etc.) mais, on ne peut pas tout voir et nous privilégions le centre-sud du pays, plus authentique et moins touristique. Une belle autoroute nous conduira en deux petites journées à Marrakech. Le paysage qui s'offre à nous est celui de vertes plaines cultivées et irriguées. Mais ce qui nous surprend le plus c'est la pauvreté du pays et les moyens rudimentaires de culture. Il est courant de voir les habitants travailler la terre manuellement et de les voir se déplacer avec une petite charrette tirée par un âne, même sur les grandes routes. On se croirait au Népal ou en Bolivie et ce n'est pas peu dire ! Les maisons sont faites de briques de terre rougeâtre et de tristes bidonvilles bordent les grandes villes. Nous savions que le Maroc ce n'était pas l'Europe comme conditions de vie mais on ne croyait pas se retrouver autant dans le tiers-monde.

Pas de problème toutefois pour les camping-caristes. Depuis quelques années la qualité des campings s'est beaucoup améliorée et on peut trouver à dormir en toute sécurité un peu partout.

Notre moto attire bien des regards
Notre premier vrai contact avec le pays sera donc à Marrakech. Notre camping, près d'une palmeraie, est à une quinzaine de km du centre de la médina, la vieille ville. C'est donc à moto qu'on se rendra à la Place Djema El Fna, au centre de la médina. Pas de problème pour garer la moto, il y a des stationnements surveillés partout et ça coûte moins de 50 cents pour toute la journée ! Petit aparté à-propos de la moto... elle attire bien des regards admiratifs et des questions. Invariablement, c'est d'abord «combien coûte-t-elle?» puis «combien de cc le moteur?», «quelle vitesse fait-elle?», «êtes-vous venus de France en moto?» À les entendre, on croirait que nous sommes les heureux propriétaires d'une superbe BMW 1000 cc !!! C'est vrai qu'à comparer à leur mobylettes 50cc à pédales et en état de décrépitude avancée, notre Honda 125 a bien fière allure !

Marchand d'herbes dans le souk de Marrakech
Donc, une fois notre fier engin bien garé, nous nous lançons à la découverte de la médina de Marrakech. Pour un premier contact, pas de plan bien défini; de toute façon, c'est bien connu, nous nous perdrons dans le souk (un véritable labyrinthe) et, immanquablement, nous nous retrouverons dans un magasin de tapis ! Eh bien, il en a été exactement ainsi mais ce fut fait de façon tellement gentille et agréable qu'on ne peut refuser et, après coup, en rire ! Un passant nous dit qu'il faut absolument voir le quartier des tanneries, en nous expliquant qu'il y a des tanneries berbères, qui traitent les grandes peaux (vache, chameau etc.), et les tanneries arabes, qui traitent les plus petites peaux (moutons, chèvres etc.). Il s'offre gentiment à nous y amener, c'est sur son chemin de toute façon. En cours de route, il s'intéresse à nous et répond aimablement à toutes nos questions. Arrivés à une tannerie, il nous quitte sans rien demander et nous confie à un tiers qui nous fait visiter la tannerie en plein air. Puis, on nous invite à passer à la finition du produit... c'est-à-dire le magasin !!! Sacs à main, babouches, poufs, tapis, tout y passe et, il faut bien le reconnaître, la marchandise est très belle. Là où notre expérience de touriste averti nous a servis, c'est que nous avons réussi à sortir élégamment du magasin sans rien acheter ! Mais, pour être franc, il a bien fallu verser quelques dirhams au guide de la tannerie pour nous extirper de là !

Minaret de la Koutoubia, la grande mosquée de la médina de Marrakech
C'est vendredi, jour de prière pour les musulmans. Du haut des 70 m du minaret de la Koutoubia, la grande mosquée de la médina qui date du 12e siècle, le muezzin appelle à la prière les fidèles 5 fois par jour. Au Maroc, les non-musulmans ne sont pas admis dans les mosquées; il semble que ce soit une décision de l'administration française du temps du protectorat pour protéger et respecter les lieux de culte, règle qui se perpétue de nos jours.

Place Djema El Fna, la grande place de la médina de Marrakech
Tout à côté de la Koutoubia se trouve la fameuse Place Djema El Fna. «Place principale de Marrakech, Djema El Fna a des allures de théâtre en plein air aux spectacles permanents. Les animations et le théâtre de rue n'y ont jamais cessé depuis les années 1050, quand la place était le lieu des exécutions publiques. Dès 10h, des charmeurs de serpents soufflent dans leurs flûtes pour apaiser les cobras dérangés par les pétarades des scooters. Des tatoueurs au henné invitent les passants à s'approcher et des marchands d'eau, coiffés d'un chapeau à franges, entrechoquent leurs gobelets en cuivre afin d'attirer les clients. Le spectacle atteint son apogée au crépuscule avec l'arrivée d'une multitude de cuisiniers qui installent leurs grils pour la soirée. Quant aux conteurs, ils font revivre d'anciennes légendes à côtés d'astrologues, de guérisseurs, de tireuses de cartes, de danseuses et de musiciens de toute sorte. Pour cette renaissance quotidienne des légendes urbaines et de la tradition orale marocaine, l'Unesco a déclaré Djema El Fna «chef-d'oeuvre du patrimoine culturel immatériel mondial» en 2001. Si l'attentat perpétré dans un café de la place en avril 2011 a laissé le pays dans un état de profonde sidération, les artistes n'ont pas tardé à réinvestir les lieux. Par tous les temps et tous les climats politiques, le spectacle se perpétue sur Djema El Fna.»

Tombeaux saadiens
Le lendemain, fort de notre expérience, nous nous dirigeons vers un autre coin de la médina, à la recherche des Tombeaux saadiens et du Palais de la Bahia. Impossible de s'y retrouver sans demander des indications aux marocains car les noms de rues sont absents ou écrits en arabe. On a bien tenté encore une fois de nous amener à un centre artisanal prétextant que le palais était fermé actuellement mais nous avons su résister et finalement atteindre notre but ! Le site des Tombeaux saadiens date de 1603, alors que le sultan saadien El-Masour n'hésita pas à importer du marbre de Carrare pour sa dernière demeure et couvrir d'or pur les voûtes en nid-d'abeilles de la salle où il repose. Le site abrite également des tombeaux de ses fils, épouses, chanceliers et conseillers. Fait remarquable, le sultan succédant à El-Mansour, voulant faire oublier la splendeur de son prédécesseur, fit murer les tombeaux qui tombèrent dans l'oubli; ce n'est qu'en 1917, à la faveur d'une photo aérienne, que les tombeaux saadiens furent redécouverts.

Un des nombreux plafonds peints du Palais de la Bahia
Le Palais de la Bahia est quant à lui le résultat de 14 années de travail des meilleurs artisans du pays. Commencée en 1860 puis embellie entre 1894 et 1900, la Bahia «la Splendide» est entièrement décorée du sol au plafond. Les plafonds en bois peints, dorés et marquetés sont tout simplement splendides ! De même, les céramiques recouvrant les planchers et les murs («zelliges») ne sont pas sans rappeler celles que nous avons vues au célèbre Alhambra de Granada, lui aussi d'origine maure. Petite cour, cour d'honneur, harem, bassin d'eau, ce ne sont que quelques unes des 150 pièces du palais que nous visiterons. On dit que le Palais de la Bahia était d'une trop grande beauté. «En 1908, le pacha décida de s'en servir pour accueillir ses hôtes français, lesquels l'en chassèrent en 1911 pour y installer les résidents généraux du protectorat !»

Réal au Jardin de Majorelle
Enfin, pour changer d'époque, nous sommes allés faire une promenade par un beau dimanche ensoleillé dans le Jardin de Majorelle dans la nouvelle ville. «Dans les années 1960 et 1970, hippies et autres aventuriers en quête de spiritualité contribuèrent à bâtir le mythe de la cité, et les visites de stars comme les Rolling Stones, les Beatles et Led Zeppelin ajoutèrent à cette nouvelle gloire. Arriva ensuite l'élite de la mode française avec Yves St-Laurent et Jean-Paul Gaultier, des top-modèles, tous à la recherche d'un hébergement chic.» Pour la remercier de l'avoir «adopté» en 1964, Yves St-Laurent offrit à Marrakech la restauration du Jardin de Majorelle, créé en 1924 par le peintre français Jacques Majorelle. Le jardin abrite 300 espèces de plantes des cinq continents, surtout des plantes du désert tels cactus et plantes grasses. La villa abrite un magnifique Musée d'Art islamique regroupant photos d'époque, bijoux, costumes et objets divers utilisés par les tribus berbères. Malheureusement, il est défendu de prendre des photos, snif, snif...

Les montagnes du Haut-Atlas enneigées en toile de fond à Marrakech
Au pied des montagnes du Haut Altas enneigées à ce temps-ci de l'année, Marrakech, 1,6 million d'habitants aujourd'hui, a une bien longue histoire. Nombre de caravanes du désert passèrent par cet avant-poste avant qu'un chef berbère décide de construire des remparts autour du campement en 1062, conscient du potentiel stratégique du lieu, sur la route du commerce entre le Sahara et la mer. Plusieurs dynasties s'y succédèrent, Almoravides, Almohades, et Saadiens, et ont fait de Marrakech, leur cité impériale. Systèmes d'irrigation, palais, forteresses, remparts, mosquées et jardins furent édifiés tour à tour par les sultans et les vizirs la gouvernant. Aujourd'hui, le Maroc est un état indépendant, une monarchie constitutionnelle avec le roi Mohammed VI à sa tête. Rabat en est la capitale alors que Casablanca, 4 millions d'habitants, en est la capitale économique. Marrakech, conserve un rôle touristique de premier plan; elle continue donc de faire ce qu'elle a toujours fait depuis des siècles, c'est-à-dire accueillir les voyageurs de passage.